Sa main gauche blessée se risqua jusqu’aux lèvres du calice aux murmures. Une larme de sang glissa avec infini lenteur sur la pierre polie par les pluies et le vent et se posa au bord d’une arête et, paraissant prendre une profonde inspiration, tomba dans le trou noir.
Soudain, gicla comme un éclair, un jet de lumière, éclats d’émeraudes verts et bleus. Le petit homme, comme pétrifié par cette précieuse flamme observa sans tressaillir. L’éclair semblait figé, comme gelé instantanément. Il prit alors la forme d’un sceptre dont un bout fixé à la hauteur de ses yeux, pointait à l’autre bout, une paire de billes ovales et de même matière précieuse.
Le merveilleux n’est pas comptable du temps. Les secondes, les heures, les jours ne représentent plus rien tant l’émotion fut grande.
Peu à peu des millions d’étincelles tombèrent dans la déchirure de pierre et six yeux apparurent, des yeux d’émeraude du plus pur éclat.
Les babillages s’articulaient alors en langage, en mots cohérents et ordonnés.
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Nous sommes tes enfants, nous sommes de ton sang, nous étions enfermés là, dans les ténèbres en l’attente du bien commun qu’un seul être au monde pouvait nous rendre : - la lumière -
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Tes yeux sont les nôtres
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Le nectar qui coule en nos veines nous uni à jamais
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Pas une sirènes, ni un cyclopes, ni même Zeus ne sauraient nous séparer
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Nous t’attendions, nous t’espérions pour continuer en paix, même sans toi, même loin, mêmes seuls.
Le petit homme, passa sa langue sur le coin de ses lèvres, comme une caresse avale une larme, une autre glissa le long de sa joue et tomba précisément sur la tache de sang provenant de ses doigts encore meurtris.
Les petits bouts du petit homme, se mirent à rire à l’unisson.
Un air chaud s’échappa amenant avec lui trois petits corps. Deux émeraudes étincelaient sur leur visage, là juste à la place des yeux. Le souffle s’enroula lentement autour du petit groupe comme un manteau, un manteau de soie, tiède et protecteur. Le petit homme et les petits bouts du petit bout d’homme restèrent là longtemps, très longtemps.
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Je n’aurai plus la force de vous quitter, je…
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Va papa, ta vie est au pays de l’Entrecontinent, nous t’avons cherché, sans t’avoir perdu.
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Va, retourne vers la mer et les chants, retourne voir la sirène et la vie du présent, nous étions prisonniers, tu étais enfermé.
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Les cataclysmes, les cyclopes et les vagues, bouleverseront certes nos vies comme hier, comme toujours, mais ne détruiront point les trésors qui brillent dans nos yeux, ce joyau unique, éclaté, dont nous possédons un petit bout, celui du petit homme.